Le Paris Podcast Festival en résumé : écoutez, c’est comme la radio…
Du vendredi 18 au dimanche 20 octobre, le Paris Podcast Festival a eu lieu à la Gaîté Lyrique.
Cet événement est ouvert aux professionnels et aux amateurs ; pendant 3 jours se sont succédé conférences, enregistrements en public et rencontres avec des podcasteurs.
Voici mes réactions à chaud sur ce que j’ai pu entendre et voir au Paris Podcast Festival
Des chiffres, des chiffres… mais ont-ils du sens ?
La journée du vendredi a commencé avec les résultats d’une enquête sur les “podcasts natifs”. Je suis toujours surpris par l’utilisation de ce terme. Les auditeurs ne sont pas censés comprendre la subtilité entre les productions qui font l’objet d’une diffusion dans un flux hertzien et celles conçues exclusivement pour le web.
Cette distinction n’a aucun sens et ce serait plus raisonnable de comparer l’écoute linéaire (FM, webradios, etc.) vis à vis de l’écoute à la demande (podcasts, livres audio, etc.).
La diversité des émissions produites par les radios va de pair avec la multitude des formats possibles via le podcast. Je pense même que s’inspirer de l’expérience et l’expertise des radios est clairement un plus pour tous ceux qui veulent se lancer dans le podcasting… Encore faut-il que les radios évitent d’imiter les nouveaux studios indépendants qui tendent à uniformiser le genre.
En tout cas, sans surprises, l’étude CSA / Havas présentée à l’ouverture du Paris Podcast Festival coïncide avec la dernière étude Médiamétrie à ce sujet.
- Moins d’1 français sur 10 écoute chaque semaine des “podcasts natifs” (en revanche 18% écoutent des “podcasts radio”)
- Les auditeurs de “podcasts natifs” sont avant tout de gros consommateurs de … radio ! 85% d’entre eux écoutent la radio FM, 76% des webradios, et 85% des “podcasts radio”.
- Les habitudes d’écoute en radio et en podcast sont les mêmes : en majorité l’audience est plus au RDV le matin, ainsi qu’en fin de journée.
Rien d’étonnant ; on écoute le média après le réveil, pendant qu’on se déplace ou en faisant du sport ou les tâches ménagères par exemple.
C’est cette force qu’il faut exploiter : à l’heure où nous sommes tous pressés et préoccupés à rentabiliser notre temps, pouvoir s’informer, apprendre ou se divertir tout en réalisant des tâches non intellectuelles est primordial.
Structuration de l’écosystème
A l’occasion du Paris Podcast Festival, les principaux producteurs indépendants français ont annoncé constituer une organisation professionnelle, baptisée PIA (Producteurs Indépendants de l’Audio).
Ce regroupement est cohérent : il vise à mieux défendre les intérêts de ces studios, et a aussi pour but d’obtenir des fonds de soutien à la création. Le ministère de la Culture a annoncé à cette occasion le lancement d’une mission de réflexion pour accompagner le développement de la création sonore.
J’ai un peu peur que l’histoire se répète comme on a pu le connaître avec les créateurs sur Youtube (où ce sont finalement les mêmes qui en profitent, tout en étant juge et partie).
Mais le fait que le secteur se structure et que les créateurs puissent être rémunérés convenablement est une très bonne chose.
La mesure d’audience, l’éternel débat
J’avais couvert le sujet en septembre dernier (cf article Medium ou l’épisode Des Ondes Vocast en question), et finalement en l’état ce n’est pas forcément un problème.
L’ACPM a annoncé bientôt pouvoir “certifier” les écoutes. Est-ce que cela passera par l’outil eStat Podcast de Médiamétrie, ou par un nouvel outil propriétaire ? Rien n’a été clairement précisé.
Aujourd’hui tout le monde peut utiliser Podtrac, mais c’est vrai qu’il n’y a pas de classement “officiel” pour les productions françaises.
J’espère que l’ACPM va calquer l’initiative australienne Australian Podcast Ranker qui suit les standards IAB v2 et est ouvert à tous.
Dans tous les cas, puisque les principales plateformes permettant d’écouter les podcasts (Apple Podcasts, Spotify, Deezer, etc.) ne suivent pas un standard unique comme NPR RAD, on ne peut pas obtenir les métriques intéressantes pour le secteur publicitaire. Seul le nombre d’accès au serveur hébergeant l’audio peut être mesuré.
Le podcast et la presse
Dans un contexte où les médias deviennent des “médias globaux”, il est naturel que la presse, comme la TV et les Youtubeurs, se lancent dans le podcast. Je fais beaucoup de veille et lire des articles me prend énormément de temps.
Mon rêve est de pouvoir un jour gagner quelques précieuses minutes en écoutant tous les matins l’équivalent résumé de ce je lis avant d’aller travailler (via le flash-briefing sur Alexa par exemple !).
Cependant, certains podcasts de presse ne sont pas très bien produits.
Encore une fois, s’inspirer des façons de produire en radio aide : créer du rythme pour ne pas ennuyer l’auditeur, trouver des voix suffisamment chaleureuses, soigner l’habillage et la production en général, adapter l’écriture, etc.
Podcast business : stratégie des marques, développer son audience, monétiser ses productions
Les marques s’intéressent au podcast parce qu’il est considéré comme “le média de l’intime”, “le média où la publicité est le mieux accepté”. En fait, aux Etats-Unis on commence à connaître des podcasts avec de véritables écrans publicitaires, on est loin des quelques secondes de réclames habituelles. Et c’est vraiment indigeste. En France, on a aussi NRJ qui met 3 minutes de post-roll pour promouvoir un podcast de marque sur un extrait de sa matinale qui dure… 2 minutes !
Oui, les marques ont un coup à jouer avec le podcast. Mais elles doivent faire avec le podcast ce que certaines font avec leur “blog” : de l’inbound marketing. Apporter du contenu intéressant pour son audience, et placer naturellement sa marque sans la mettre grossièrement au premier plan.
La réflexion à avoir vis à vis de sa cible en podcast est : Pourquoi s’intéresser à vous ? Apportez-vous aux potentiels auditeurs ce qu’ils attendent ?
Quant au fait de développer son audience, Maxime Piquette (CEO d’Ausha), qui a participé à un débat à ce sujet au Paris Podcast Festival, a très bien résumé ce qu’il faut faire. Tout est clairement expliqué dans son dernier article Medium que je vous invite à lire.
Pour la monétisation, je vous en ai déjà longuement parlé (cf cet article), rien de nouveau à ce sujet.
“Fictions audios” is the new “Feuilletons radiophoniques”
J’ai écouté “L’employé”, la nouvelle fiction audio de Spotify, dans la grande salle du Paris Podcast Festival.
J’étais assis, dans le noir, concentré à écouter cette série audio, comme au cinéma (mais avec un casque). Production top, histoire intéressante, mais comment dire… J’ai du mal à écouter des choses sans faire une autre activité. Me poser pour juste écouter du contenu (sans image), ce n’est pas naturel pour moi. J’ai essayé d’écouter ce type de productions en conduisant par exemple ; impossible, je dois beaucoup trop me concentrer et je perds très vite le fil. Je ne sais pas si beaucoup de gens sont dans mon cas. Mais en tout cas, au vu du budget nécessaire pour créer de telles fictions audio, j’ai un doute sur la viabilité de ces formats sur le long terme.
Mais il y a quand même des raisons d’y croire. La première journée du Paris Podcast Festival a été conclue par une masterclass de Matt Lieber, co-fondateur de Gimlet Studio (racheté récemment par Spotify). Ce dernier a dévoilé que la série en sept épisodes Sandra allait arriver en France sous le titre de “Sarah”. Affaire à suivre.
Le porno audio, promis à un bel avenir
Le samedi, le débat sur le porno audio était vraiment très intéressant. Sujet très tabou dans notre société, le porno pourrait pourtant se présenter sous des formes plus respectables, moins vulgaires et surtout passer autrement que par l’image. Le podcast porno suscite des sens jusqu’ici peu exploités.
A l’origine, ces podcasts étaient adressés aux femmes, mais il se trouve que des hommes également apprécient ce genre de contenus. Franchement, n’ayez pas honte, écoutez.
Lauréats INALAB & Palmarès 2019 de la compétition du Paris Podcast Festival
La compétition officielle du Paris Podcast Festival a “récompensé les autrices, auteurs, créatrices et créateurs en remettant 8 prix, dotés à hauteur de 3.000€ chacun, parmi une sélection de 35 podcasts”. Les prix ont été remis lors de la cérémonie de clôture de l’événement. Le palmarès 2019 est à retrouver sur le site du Paris Podcast Festival. N’hésitez pas à y faire un tour, vous découvrirez peut-être votre prochain podcast favori.
Le samedi, ont été présentés les 6 lauréats de l’appel à projets de l’INA 2019 dédié aux créateurs de podcast.
L’appel à projets INALAB 2019 de l’INA “encourage l’émergence de nouveaux formats de production audio pour une appropriation innovante de ses collections d’archives radiophoniques”.
Je vous laisse découvrir les 6 programmes sélectionnés, mais pour moi le résultat est décevant dans le sens où la fameuse “nouvelle écriture propre aux podcast natifs” est de mise. Dommage d’avoir des formes de production tournées vers le récit ou le questionnement de sujets sociétaux, et non des projets valorisant les archives radio elles mêmes, faisant découvrir et expliquer ce qu’était la radio jadis.
Conclusion
Un grand bravo à tous ceux qui ont organisé le Paris Podcast Festival, tout était très bien ficelé et le cadre était très agréable. RDV l’année prochaine ?
Et sinon, n’hésitez pas également à vous rendre aux autres événements en lien avec le podcasting : Le Salon de la Radio, PodRennes, etc.
Cet édito en audio : podcast Des Ondes Vocast
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